Le Dévoluy par l’Extérieur en 7 jours

Pierre, qui habite à Pellafol, dans le Dévoluy, rêve depuis des années à ce trek inédit : le tour du Dévoluy par l’extérieur. Mais, dans le Dévoluy, surtout par l’extérieur, il n’y a ni refuge, ni gîte ni hôtel. Alors, avec Florence, depuis des années, il prospecte et vérifie les possibilités de réaliser un tel trek. C’est ainsi qu’il nous a proposé cette année le tour du Dévoluy par l’extérieur en 7 jours, 110km et près de 10 000mD+.

Un groupe de 6 se constitue. Nous louons un fourgon car il nous faudra bivouaquer plusieurs fois et nous ne tenons pas à faire les grosses étapes prévues avec tout le barda sur le dos. Au contraire, l’idée est de marcher léger et d’avoir les bivouacs joignables par le fourgon qui portera l’intendance et le couchage. Évidemment, tous les jours, l’un de nous sera chargé de conduire le fourgon jusqu’au bivouac suivant et de faire les courses. Pierre a affiné le projet : certaines étapes peuvent être coupées en deux de façon à retrouver le fourgon au milieu de l’étape, ce qui permet à tous de faire chaque jour au minimum une ½ étape ou, inversement, de profiter d’une ½ étape pour se reposer.
Jour 1. Pellafol – Col du Noyer. 1230m, 14km.
Le premier jour nous nous retrouvons tous à Pellafol où Pierre et Florence ont prévu l’ensemble du matériel de cuisine, et ils ont prévu large, on aurait pu faire une cantine pour 40 personnes. La 1ère étape est directement au départ de Pellafol en remontant la Souloise jusqu’aux Gillardes. Là, casse croûte, changement de chauffeur. La suite consiste à contourner le Gicon et à redescendre vers l’intérieur du massif. Nous terminons les derniers kilomètres en fourgon car c’est de la route goudronnée et nous faisons notre premier bivouac au pied du col du Noyer, très bel l’emplacement. Le moral et la météo sont au beau fixe.














L’après-midi, rude montée au Gicon pour redescendre dans le massif. Petit transfert au col du Noyer.




Trace GPX Matin Trace GPX après-midi
Jour 2. Col du Noyer – Chaudun. 1400m, 14km.

La Deuxième étape au départ du col du noyer, consiste d’abord à gravir la Tète du Tourneau, qui est un magnifique belvédère, puis par un ensemble de sentiers essentiellement en forêt (ce qui nous permet d’échapper à la canicule) nous arrivons au pied du col de Chétive (1852m). Le sentier deviens raide, dans un pierrier, sous le cagnard ! Du col nous descendons par un beau sentier, parfois vertigineux, vers le village de Chaudun.
Chaudun est un village qui comptait 170 personnes vers 1800 mais, établis dans un fond de vallée quasiment sans surface plate, et une fois que toutes les forêts eurent été coupées, les habitants, face à la misère, ont décidé de vendre le village et ses terres à l’état. Il semble que ce soit un cas unique en France. Les habitants ont ainsi disparu laissant le village à l’abandon. En 2006, les maisons étant en ruines, le village a été rasé, seul reste un gîte forestier de l’ONF. C’est ce gîte que pierre a loué, ce qui nous a permis d’utiliser la piste qui descend à Chaudun.











Jour 3 : Chaudun – Sauvas. 1000m, 18km.

La troisième étape consiste, en partant de Chaudun, de passer en dessous du Pic de Bure pour rejoindre la maison forestière des Sauvas. Les Sauvas est un hameau plus petit que Chaudun mais il a une histoire similaire. Au milieu du 19e siècle il a été déserté par ses habitants une fois que toutes les forêts eurent été coupées. L’ONF, au début du 20e siècle a reboisé et a construit 2 gîtes forestiers fort agréables. Nous passons la 3e nuit au gîte des Sauvas en admirant la formidable barrière du versant Sud du Dévoluy.













Trace GPX Chaudun-Sauvas-Matin Trace GPX-Après-midi
Jour 4 : Sauvas – Col du Festre par le plateau de Bure. 1250m, 15km.

La quatrième étape est (enfin) une Sombarderie : le Pas de Paul. Malheureusement la météo annonce des pluies toute la matinée. Après concertation, et ne souhaitant pas être sous la pluie dans le Pas de Paul, nous retardons le départ et effectivement nous aurons des petites pluies durant toute la montée et même une grosse pluie à l’attaque du pas. Pendant ce temps, Juliette et Brigitte montent sur le plateau par la combe d’Aurouze. Nous nous réfugions sous un surplomb rocheux et nous attendons que le beau temps arrive. Merci à la météo et aux cartes radar car, au bout de 45 minutes, le beau temps effectivement revient.





Le soleil étant revenu et le rocher ayant séché, nous pouvons attaquer cet itinéraire d’exception. Le Pas de Paul est le lit d’un torrent qui ne coule que pendant les orages, ce qui a nettoyé l’itinéraire. C’est un escalier dévoluard constitué de petites vires de 30cm de haut en moyenne, en bon rocher propre et adhérent. Le rocher est légèrement déversé mais la montée dans cet environnement extraordinaire et bien plus facile qu’on ne l’imagine. Nous montons allègrement, les inquiétudes ayant disparu car l’itinéraire est très raide mais finalement sans grandes difficultés, pour peu qu’on n’ait pas le vertige bien sûr. Nous débouchons sur le plateau en même temps que Brigitte et Juliette et nous nous retrouvons tous aux antennes. Nous discutons avec un des techniciens, très sympathique, qui nous apprend que le téléphérique est enfin qualifié pour le transport de personnes est que, probablement à partir de septembre, l’observatoire va offrir, une journée par semaine, une visite guidée de l’observatoire avec un aller-retour en téléphérique. La liste d’inscription sera sur le web d’ici peu.










Nous repartons de l’observatoire en traversant tout le plateau de Bure pour redescendre par le pas de la Fenêtre. Nous descendons le seul et unique névé de notre trek, court mais fort raide, il donnera des émotions à quelques-uns. Après ce névé, nous sommes sur les pistes de ski de Superdévoluy et tous les sentiers descendent vers la station. Notre objectif étant le col du Festre, nous avons décidé de descendre la croupe de Tête de Pied Gros sur lequel aucun sentier n’est indiqué. C’est une croupe magnifique, peu inclinée, facile à marcher, se dirigeant vers le col du Festre, longue de 2,5km et manifestement vierge de toute trace. Le problème c’est que cette croupe se termine par des barres de falaise. Pierre utilise un couloir qu’il connaît pour l’avoir parcouru en ski de randonnée, et pour ma part, j’explore un passage plus bas de l’autre côté qui me semble prometteur. Le couloir utilisé par Pierre est facile mais il se retrouve ensuite dans une forêt très touffue difficile à traverser. Pour ma part mon itinéraire passe assez facilement au pied des barres et finit dans des pentes sans difficulté mais peu agréables. Nous nous retrouvons tous au col du Festre pour la seule soirée au restaurant car il y a un restaurant et les propriétaires louent deux yourtes et une chambre mais en ce qui nous concerne, nous avons le droit de poser les tentes tout près du restaurant.








Jour 5. Col du Festre – Col de la Croix. 1450m, 17km.

L’étape suivante commence par une petite Sombarderie bien agréable : la Crête du Vallon qui consiste à remonter le vallon des Aiguilles par sa crête Sud jusqu’au col des Aiguilles. Du col nous descendons vers la Jarjatte. Là nous retrouvons le fourgon, puis la fin de l’étape consiste à rejoindre le col de la Croix par un très long sentier qui parcourt l’extérieur du Dévoluy, descend pour traverser le grand Buech près de sa source, puis remonte dans de magnifiques alpages pour venir jusqu’au col de la Croix où nous attend le fourgon. Belle étape sans difficulté mais dans un très beau cadre, peu connu et peu parcouru. Nous planons les tentes près du cimetière de Tréminis.













Sur la crête du Vallon









Trace GPX Festre-Jarjatte Trace GPX Jarjatte-Col de la Croix
Jour 6. Le chemin de la Baronne (et les lames de l’Arçon). 1450m, 14km.

C’est une étape d’anthologie ; le Sentier de la Baronne est devenu mythique depuis que Sombardier l’a décrit. Il s’agit d’un sentier très étroit, taillé au 19e siècle dans une pente d’herbe très forte, au dessus d’une formidable barre de falaise, ce qui fait que toute chute est fatale ! On accède au sentier par une montée assez rude, le sentier lui-même étant légèrement montant, de 1900m à 2400m.
Les bruits que nous avions s’avèrent exacts ; un effondrement a emporté le sentier sur quelques dizaines de mètres ce qui impose de traverser dans une barre de falaise sur une vire très fine ; c’est de loin le pas le plus engagé de ce sentier qu’il conviendrait de protéger car il empêche la plupart des randonneurs de faire cet itinéraire d’exception. Le reste du sentier est une longue diagonale montante très régulière mais sur laquelle la concentration doit être permanente, le pas de côté étant totalement exclu. Sous le sommet de la Cavale le sentier a atteint son altitude maximum et commence la descente vers la cabane de Rochassac. Longue pause à ce magnifique petit refuge où on retrouve ceux qui ont parcouru les Lames de l’Arçon, et descente vers le parking de Longueville où nous attend le fourgon et une nouvelle venue, Frédérique, que le fourgon est allé récupérer au bus à Mens. Nous avons le plaisir de retrouver toute l’équipe qui, avec Alain, a fait l’arête du Rattier ce même jour. Nous prenons une bière ensemble, heureux de nous retrouver, et de papoter. Ils nous disent simplement que du haut du Rattier, la suite de l’arête n’est pas engageante mais ça, on le savait.











Dans le sentier de la Baronne.






Trace GPX Sentier de la Baronne
Trace GPX des Lames de l’Arçon
Jour 7. L’Obiou par le Rattier. 1900m, 14km.
Un article séparé décrit cette magnifique étape.
Pour cette dernière étape et le clou de ce trek, nous avons un gros dénivelé, des difficultés techniques.








La première partie de l’arête, jusqu’au Rattier, n’est pas bien difficile mais aérienne et très agréable, avec une vue fantastique des deux cotés.




























Trace GPX L’Obiou par le Rattier
Nous descendons à Pellafol chez Pierre et Florence, nous prenons un bain revigorant dans le bassin de la fontaine car la chaleur est revenue. Pierre offre des boissons, sourires et bonne humeur, ce trek est une vraie réussite. Nous déchargeons le fourgon, nous remercions moulte fois Pierre pour nous avoir organisé ce beau trek, et nous repartons à 5 vers Grenoble. C’est à la Salle en Beaumont qu’une conductrice, venant en sens inverse, fit un malaise cardiaque, sa voiture est venu percuter la voiture qui venait en face puis notre fourgon. Bilan : 14 blessés hospitalisés, dont un hélicoptère pour Brigitte, une ambulance pour Frédérique, et les urgences de la Mure pour les autres. Finalement, seulement des douleurs et des contusions sauf pour Brigitte qui a 3 côtes et le sternum cassés.



Fin de trek qui aurait pu être tragique mais dont on ne retiendra que le formidable itinéraire, les étapes inoubliables, la bonne humeur, le plaisir d’être ensemble et de découvrir ce massif étrange, étonnant et envoûtant.
Participants : Pierre, Florence, Brigitte, Juliette, Xavier, Frédérique et Jacky.
Avec les photos de tous.