Visite de l’observatoire NOEMA au plateau de Bure

Grenoble Amitié Nature - Club de montagne omnisports

Visite de l’observatoire NOEMA au plateau de Bure

Le pourquoi

Cela faisait des années qu’aller voir les antennes de l’observatoire NOEMA au plateau de Bure faisait partie de ma liste des choses à explorer dans ma vie. NOEMA est un acronyme qui veut dire NOrthern Extended Millimeter Array. Mieux qu’une traduction approximative de l’acronyme, il vaut mieux dire qu’il s’agit du radiotélescope par interférométrie le plus puissant de l’hémisphère Nord.

Vue aérienne de l’observatoire (CC BY-SA 4.0 Wikipédia)

Contrairement à un télescope optique qui utilise des ondes dans le visible d’une longueur d’onde de l’ordre du micromètre, le radiotélescope utilise des ondes avec une longueur d’onde de l’ordre du millimètre (entre les infrarouges et les micro-ondes). Ce choix permet alors de pouvoir observer les nuages de gaz, qui ne rayonnent pas à la manière des étoiles qui elles nécessitent des télescopes optiques.

Le côté « interférométrie » veut dire que ce n’est pas un instrument qui utilise un seul et unique télescope pour faire ses observations. Mais un ensemble de télescopes dont les données sont ensuite compilées par un algorithme. Cela permet d’obtenir des données équivalentes à celles d’un unique télescope qui aurait le même diamètre que la distance la plus grande entre deux des télescopes de l’interféromètre. Les modifications actuelles de l’observatoire vont permettre d’écarter les antennes jusqu’à 1,7 km. Il est facilement imaginable qu’un télescope unique avec une parabole de 1,7 km de diamètre ne serait pas envisageable à construire…

Vue nocturne de l’observatoire et de la voie lactée (CC BY-SA 4.0 Wikipédia)

Un dernier détail est que l’observatoire doit être construit en altitude pour diminuer la teneur en eau de l’atmosphère, et sur une grande surface plane pour pouvoir utiliser l’interférométrie. Le plateau de Bure était donc un lieu idéal pour sa construction. Pour avoir plus d’information sur le sujet, vous trouverez ci-après quelques liens Wikipédia utiles. Car je resterai généraliste ici, à hauteur de mes connaissances limitées sur le sujet.

La préparation

J’avais donc souvent pensé à aller voir les antennes, là haut sur le plateau. Mais quand on en a vu des photos en long, en large et en travers, est-ce que cela vaut encore vraiment la peine de faire autant de route juste pour cela ? D’autant que pour monter là-haut, il faut faire 1075 mètres de dénivelé, dans une combe caillouteuse et exposée. Mais quand David, un de nos adhérents qui va faire l’entretien des extincteurs là-haut nous a parlé de journées portes-ouvertes, mon sang d’animateur n’a fait qu’un tour. J’ai donc proposé cette sortie au club qui a vite intéressé tout un groupe. En cinq jours, quinze personnes s’étaient inscrites. Lorsque j’ai appelé l’office de tourisme pour réserver, il ne restait justement plus que quinze places pour le seul créneau de la journée qui était suffisamment pratique pour déplacer un tel groupe hétéroclite (âges de 8 à 77 ans). Quelle chance ! J’ai donc fermé les inscriptions. Et si trois personnes n’ont pas pu se joindre, trois autres personnes en liste d’attente les ont remplacées aussi sec.

La préparation de la sortie n’a pas non plus été moins riche en émotions. Car la météo n’a pas été des plus complaisante. Quelques jours auparavant, elle était assez mauvaise pour le samedi, comme pour le dimanche, jour choisi. En demandant des informations à l’office de tourisme ainsi qu’un topo de la randonnée, je n’avais reçu comme info que le topo. Pas facile pour se faire une idée correcte des conditions.

Vue webcam des conditions deux jours plus tôt

Marylène, une de nos adhérentes qui travaille à l’Institut de RAdioastronomie Millimétrique (IRAM ; institut qui gère l’observatoire) a pu se renseigner sur les conditions là-haut. Elle m’a envoyé une image webcam d’un plateau pris dans le brouillard et la neige… Ces informations étaient d’autant plus critiques pour nous vu le groupe constitué. Un autre de nos adhérents, Benoît, qui a fait la visite le samedi, nous a relaté des conditions dantesques, les photos illustratives parlant d’elles-même !

Mais la prévision météo s’améliorant régulièrement, j’ai maintenu la sortie, en conseillant tout de même des vêtements chauds.

La montée au plateau

C’est donc à sept heures et demi du matin que nous nous retrouvons à la poste de Seyssinet pour le covoiturage. En étant tout le monde au même rendez-vous, nous arrivons à ne prendre que trois voitures ; bien rentabilisées. S’en suit un long trajet vers le parking de Super Devoluy, qui donne aux passagers la chance d’admirer le Dévoluy et les lumières matinales qui dansent avec les quelques nuages encore accrochés.

Il n’y a pas que les panneaux qui sont contents d’avoir du soleil

Arrivés sur le parking, nous nous rendons compte que je me suis trompé. Je pensais que nous pourrions visiter un peu le « village astronomique » mis en place dans la station avec des expositions, des conférences et des activités pour les enfants. Préoccupé par la météo, je n’avais pas bien lu l’heure de d’ouverture de cette installation temporaire. Tout ça pour une météo qui se révèle d’ailleurs splendide, en parfait contraste avec les conditions de la veille. C’est surtout dommage pour la petite Alice mais nous devrions pouvoir le voir un peu sur le retour.

Le pic de Bure qui se détache comme une terre promise

Pour guider le trajet, je désigne Élise. Elle souhaite apprendre les techniques de cartographie (téléphone et papier) et je sais qu’elle sera bien assistée par Frédéric, notre initiateur rando de choc. Moi je me place en arrière pour faire voiture balai, obligatoire avec un groupe si grand.

La montée se retrouve vite accablante à cause de nos équipements trop chauds. Certains qui ont aussi des affaires légères se changent rapidement. Pour les autres, on espère seulement que sur le plateau il fera plus frais. Le groupe s’étire rapidement dans la montagne selon le rythme propre de chacun. Suite aux conseils de Benoît, nous prenons le GR pour monter, et la variante de l’autre côté de la falaise de la « traversée héroïque » sera pour le retour.

Une pause est bien appréciée dans la petite dépression avant d’attaquer le pierrier, et permet aux marcheurs aux petites pattes de rattraper le reste du groupe.

La petite plaine pour faire une pause parmi les buissons de myrtilliers
Le pierrier terminal avec en fond la gare d’arrivée du téléphérique de l’observatoire

La dernière combe avant d’arriver au plateau est à l’ombre, et des traces de neige et de glace sont encore présentes. Ajouté à cela que le chemin se fait en pierrier, les derniers cinquante mètres ne sont pas si facile. Pour ma part, je remonte le groupe comme je peux afin de pouvoir compter les premiers arrivés. Là-haut chacun découvre le paysage et les premières vues sur les antennes. Didier, qui a comme habitude de faire du cerf-volant aux sommets s’affaire à préparer son matériel en profitant du vent qui a fini par se lever, juste sur le plateau. J’espérais avoir le temps de faire le pic de Bure en remplacement du village astronomique mais nous manquons de temps. Je pose donc mon sac et retourne faire la voiture balai, histoire de me fatiguer un peu.

La gare d’arrivée et Didier à la manœuvre
Les antennes avec en fond la course pour aller au pic

Nous avons une heure pour pouvoir prendre le pique-nique, ce qui est d’autant plus confortable que deux tables sont libres pour accueillir notre grand groupe. La préparation de la journée par l’IRAM a été jusqu’à nous mettre à disposition ces deux tables fraîchement repeintes !

Et comme un membre du groupe fête son anniversaire le lendemain, nous pouvons terminer le repas avec ce que l’on a pu monter facilement afin de célébrer ça. Une pogne de Roman comme gâteau, un mini-réchaud comme bougie tempête (impossible toutefois à souffler par l’intéressé, du coup), et quelques caramels pour les becs sucrés.

Une belle tablée

La visite

La partie guidée de la visite commence à l’extérieur, avec un membre du personnel de l’IRAM. C’est un opérateur de la salle de contrôle qui visiblement est passionné par son travail. Il nous explique de manière claire les informations sur le fonctionnement de l’observatoire, mais aussi une foule de détails techniques sur :

  • Les travaux réalisés
  • Les mensurations et performances des appareils
  • Les spécificités d’entretien
  • Les limites de fonctionnement
  • Les coûts
  • La vie sur le plateau de Bure
  • La logistique
  • Etc.
La parabole de notre guide
Un balais orchestré par une main invisible

Une des récentes avancées très connues et pour laquelle NOEMA a participé est le projet Event Horizon Telescope qui avait pour but de prendre la première image du trou noir Sagittarius A* qui se trouve au centre de notre galaxie. Quand le guide nous explique que l’écartement des télescopes de NOEMA permet d’améliorer la résolution des images prises pour atteindre celle d’un télescope qui aurait comme diamètre la longueur d’écartement, ici c’est la terre entière qui permet l’écartement des télescopes choisis pour le projet ! Imaginez, ce serait comme avoir une parabole unique qui recouvrirait la terre !

La deuxième partie de la visite guidée permet de voir l’intérieur des bâtiments. Nous avons notamment pu voir le hall d’entretien des antennes, en même jeter un coup d’œil dans l’une d’elles. Nous avons aussi pu voir les fonctions support comme les arrivées électriques, les groupes électrogènes, le garage pour les dameuses, la salle de calcul, la gare d’arrivée du téléphérique. Et en point d’orgue, nous avons pu rentrer dans la salle de contrôle et ainsi voir comment étaient réalisés les relevés de mesure.

Les géantes à l’entretien
Les entrailles de la bête
La visite va jusqu’aux éléments de secours
En point d’orgue, la visite de la salle de contrôle

La visite a été plus longue que prévue, et a durée deux heures au lieu d’une. Mais si certains commençaient à avoir un peu d’ennui ou de mal au dos à force de piétiner, tous étaient ravis d’avoir eu la chance de vivre ces premières portes ouvertes de l’observatoire NOEMA.

Chapeau aux organisateurs des journées et merci à eux !

La fin de la journée

Départ en tête pour espérer voir le village astronomique

La descente se fait tranquillement par la variante qui m’avait été conseillée. Les membres du groupe qui n’ont pas la carte sous les yeux ont peur que je leur fasse faire un détour. Mais en distance cette variante est même plus courte. D’autant que le paysage de ce côté de l’arrête est vraiment joli, avec une vue plus dégagée. Les infos étaient bonnes !

Un panorama splendide qui valait le détour

Malheureusement pour Alice, nous nous apercevons qu’à cause du doublement de la durée de visite, nous n’arriverons pas à temps pour voir le village astronomique ouvert. Cette information est d’autant plus vraie qu’avec un appel à un amis, nous découvrons que par manque de visiteurs, les organisateurs ont pliés bagages à 17 h au lieu de 18 h. C’en est trop pour la petite Alice pour qui cette déconvenue porte le coup de grâce à la motivation qui lui a permis de faire cette si longue balade. Mais même sans motivation, il faut bien rentrer et même avec de la tristesse, tout le monde arrive à bon port.

Dernière contemplation avant le retour

A bientôt sept heures du soir, il sera trop tard pour prendre un pot de l’amitié traditionnel. Nous rentrons donc tous vers Grenoble, afin de profiter d’un repos bien mérité, bercé par les étoiles dans les yeux que nous avons eu.

Martin

  • Participants : Alice, Claire, David, Didier, Élisabeth, Élise, Frédéric, Jean-Claude, Jean-François, Lætitia, Martin, Maurice, Michèle, Sabah, Stéphanie
  • 14,5 km
  • 1075 m D+
  • 9 heures
  • Trace GPS : lien (un petit morceau en aller-retour a été enregistré en plus)
Tracé réalisé